dimanche 13 janvier 2008

Forest dans le fluide

Jean-Claude Forest a véritablement commencé sa carrière en 51, avec Pour la horde. Il en était fier, et surtout de pouvoir apparaitre aux cotés de Poïvet et Gillon, dans le petit groupe des auteurs de bande dessinée réaliste. Cette BD "préhistorique", pour le coup, dérive dans le fantastique à bord du Liberatore, et on lui conseille de faire dans le comique : ainsi est né Le copyright. Mais assez vite arrêté. Les journaux sont maîtres à bord à cette époque... le statut de dessinateur est assez proche de celui de livreur.

Et Forest tombe malade. Pneumonies sur pneumonies. La maladie est très présente dans son œuvre, en particulier après les Barbarella.
Après Vaillant, Forest passe à la SPE, pour reprendre pour quelques numéros, les aventures de Charlot, dont il ré-écrit les scénarios lamentables. Et il se met à écrire vraiment, notamment les prémices de La jonque fantôme... Il peint aussi.
Les années 50 et 60 seront sinistres, la loi de 49 concernant les illustrés destinés à la jeunesse favorise le développement de tintin et Spirou. Il se tourne vers la SF, illustre des couvertures de fiction, des romans... Retombe gravement malade. Il commence à dessiner Barbarella, dans l'indifférence générale (à part peut-être Lob et Topor, dira-t-il). Il reprend à cette époque Bicot, pour se nourrir et se soigner.
En 63, il participe à la création du Club des Bandes-dessinées (avec entre autre Alain Renais). Moliterni y adhérera pour y mettre le bocson : la BD prend son envol, se théorise, se critique !!! Barbarella parait en album en 64, et c'est une révélation. C'est, dans l'esprit des gens, amateurs de BD ou de ciné, une BD érotique. Alors que si peu. C'est une BD d'aventure, pleine de poésie. Mon cher libraire rennais de M'enfin puis Ty'bull et re-M'enfin me déconseillait sa lecture, lors de la parution de l'horrible double album chez les humanos... J'ai mis du temps à m'y mettre. Revenons à nos moutons historiques. Barbarella est un succès mondial, Jane Fonda comme l'héroïne de papier sont dans tous les journaux, sur des affiches de pub, inspirent des chansons (de Gainsbourg à Boney M), des noms de chanteurs (Lio et Duran-duran), des cinéastes... La suite ne connaitra pas le même succès, car Forest y mettra moins de fesses.

Viennent Mystérieuse et Hypocrite dans Pilote, au début des années 70. Mystérieuse est l'adaptation du roman de Vernes, où ré-apparait Barbarella vieille. C'est un bijou. Mais ma découverte de Forest, il y a un peu plus de 10 ans, vient de la lecture d'Hypocrite, dans une toute petite bibliothèque de quartier. Les dialogues savoureux, la poésie, l'irréalisme des situations, les attitudes des personnages, un peu théatrales, et surtout le trait !!! Ca m'a fait comme le Tintin de Blutch dans Fluide glacial : ça m'a touché tout au fond de moi. J'admire ces deux auteurs par-dessus tout, j'essaye de les faire découvrir autour de moi, mais je comprend qu'on puisse ne pas aimer, tellement ce que j'aime chez eux est à moi...

Le 4ème épisode d'Hypocrite est refusé par Pilote (la nouvelle bande dessinée voue une admiration à Vidal, pour leur avoir ouvert les portes du succès avec Poisson-pilote, mais faudra que je fasse le compte de tous les auteurs que j'aime rejetés par lui... salaud de Vidal !), le 3ème chapitre de Mystérieuse éjecté de Pif... Parait La jonque... et puis c'en est fini de son trait magnifique !! Forest est trop malade, subissant de lourdes attaques régulières.
Il donne ses histoires à Cabanes (Le roman de Renart), Tardi (Ici même), Bignon (Il faut y croire), Savard (Leonid Beaudragon dans l'Okapi qu'il dirigeait). Si, on le retrouve dans des albums collectif : dans Lob de la jungle sur un scénario de son ami Jacques, dans Transport frippons, dans A ma mer de Greenpeace, dans les hors-séries Architectures, Hergé et Rhytm n' bulles de (à suivre)... Je cherche encore... Et j'attend l'esprit éclairé qui rassemblera ces perles éparpillée pour en faire la rivière qui nous innondera (c'est facile d'éditer une BD ?).

Forest est essentiel dans mon histoire avec la bande dessinée, et dans l'histoire du 9ème art. Malgré tout le mal que je pense de Menu, je rend grâce à l'association de ré-éditer les Hypocrite (y compris le premier, conçu en strips, et peu agréable à lire en album). Les retours de Pilote ont parfaitement ignoré le maître. Dans les 50 albums de la bibliothèque idéale de BAM, on retrouve quand même Barbarella et Ici-même.
Par contre, je ne suis pas très emballé par ses illustrations abstraites et ses couvertures de romans de SF, très sombres, fouillis... Même son portfolio Louise-Rose, réalisé avec Danie Dubos, m'a un peu déçu (et aussi un peu ruiné). J'ai acquéru le petit facicule sorti à l'occasion de Angoulême 11, Jean-Claude Forest : 30 ans d'images et le bel ouvrage paru aux éditions Groensteen. Pour prolonger la lecture et découvrir les autres facette de ce magicien.

Il apparait dans les Fluides n°1, 3, 7, 24 et 26, qui seront ses tiroirs de poche et fonds de miroir. Il y a 20 années entre ces 2 illustrations.

Et les clins des oeils dans tout ça ?
Forest se met en scène (L'Orticario puis Brownigwell, dans Barbarella, un peu d'Henri, le père malade de Julien, et du vieil Original dans L'hydragon), se sert de sa femme pour modèle (Barbarella) qui accouche de leur fils Julien (Petit renard dans Barbarella et Julien dans L'hydragon). Et Danie Dubos, sa nouvelle compagne sera Hypocrite après avoir été Lio, belle petite brune (comptant pas pour une prune) dans Barbarella. On retrouve ses personnages d'une BD à l'autre (Barbarella dans Mystérieuse, et des connexions entre Mystérieuse et Hypocrite)... créant une bulle "Forest".
Dans Bébé Cyanure, un escalier magique conduit dans l'univers de Tintin. On découvre un four Bécassine dans Barbarella. Et le Freddy-Fred, dit Fred, apparait dans Etircopyh, comme ce dessin d'Alexis et Fred. On y parle aussi du poète Lob l'ancien. Dans N'importe quoi, on passe devant le Delirius circus (de Druillet et Lob), une sorte d'animal cri "F'murrrr".


3 commentaires:

  1. L'album dont vous rêvez (?), je suis en train de le finir :
    http://hillen661.eklablog.com/bout-a-bout-et-ainsi-de-suite-jean-claude-forest-1967-1992-p1233816

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