mardi 2 février 2016

Mise à prix

Bien sûr c'était pas drôle drôle. Donner un prix et le retirer ensuite : il y a un peu de cruauté dans le geste. Alors c'est marrant parce qu'en écrivant ça, j'ai l'image d'un type qui donne un jouet à un gamin... et le reprend avec un sourire sadique. Parce que finalement, cette cérémonie ne dit-elle pas ça : le prix, par essence, est un machin pour les gamins ! Une belle image pour le bon élève. Un cadeau à Noël pour l'enfant sage. Le prix rend puéril une profession jugée telle dans les médias, mais qui ne rate pas une occasion de mettre en avant ce trait.
Pourquoi il n'y a pas de prix du meilleur plombier ? Pourquoi chez les plombiers, il n'y a pas de prix du meilleur serrage d'écrou ? Pourquoi mon chef ne me donne pas de prix ?
C'est étonnant que les prix soient spécifiques à des arts, précisément, où le ressenti et l'histoire de chacun entre en compte, où rien n'est mesurable ni justifiable. Les peintures, les films de cinoches, les bd... pourquoi doit-on trouver la meilleure ? Existe-t-il une meilleure pour tout le monde ? La meilleure pour tout le monde a-t-elle plus de valeur que la meilleure de chacun ? Je sais que le moindre trait de Blutch, Cuvelier, Forest ou Prudhomme me touche au plus profond. Je ne sais l'expliquer, je ne les défendrais même pas si un gus me disait que Blutch c'est tout pourri, que Prudhomme c'est tout de travers...
Le prix n'a aucun sens. En tout cas, s'il en a un, il n'a aucun intérêt, à part identifier le groupe qui l'a donné (Sfar pour télérama dit plus de ce qu'est télérama que du talent de Sfar).
Je pense par contre qu'on pourrait donner le prix du meilleur squatter des ondes d'antenne (à ce Sattouf qui m'horripile), à la plus grande production (en kg/an) de bd (Corbeyran au scénario et Sfar au dessin). Là on a un mètre, on mesure, y a pas de doute : tout le monde est d'accord. Mais le mieux, c'est que chacun donne son prix. Qu'on aille chez notre libraire (je parle pas de fnac ou cultura, hein) acheter des BD. Dire à l'artiste combien son œuvre est importante pour soi, et lui faire un bisou à l'occasion avec tout son cœur.

Moi, le truc qui m'a vraiment gêné (qu'il n'y ai pas de femmes dans la liste de grand prix, sans être démago, faut pas déconner, c'était évident), c'est ce prix Couilles au cul. Là, à part Lisa Mandel, on n'a pas beaucoup vu les gonzesses. Calmées par leur ainée primée, qu'a sans doute des projets chez Fluide glacial.
Je pense que le langage forme la pensée, et vice versa. Installer une expression dans le langage, c'est installer un mode de pensée. Qu'importe que le truc machiste soit dit au premier, au deuxième ou au troisième degré, parce qu'il y a toujours un premier degré. Dire que le courage est une vertu masculine est une connerie. Admettre que la société est machiste, qu'il y a des habitudes à changer (c'est pas parce qu'on a toujours frappé les femmes qu'on doit continuer), c'est peut-être là le courage. Merci Lisa.

Et puis, arrêtez d'attendre des prix les gars zé les filles, vous valez mieux que ça.

3 commentaires:

  1. Sattouf dans la liste des décorables
    Sattouf dans "La nouvelle édition" de Canal+ !
    Sattouf partout !
    AAAAAAAAA !!!!
    Il est là ! à coté de moi !
    Au secours !!!

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  2. La liste des décorables est croquignolette. J'ignorais qu'on pouvait avoir ce genre d'honneur dans la bayday...
    Pour le palmarès, c'est une tempête dans un gobelet. Dommage pour le présentateur, le reste de la cérémonie était très bien...

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    1. Question décorable, le ministère a choisi des jeunes :
      Julie Maroh, Chloé Cruchaudet, Aurélie Neyret, Tanxxx, Marguerite Abouet, Christophe Blain, Mathieu Sapin et Riad Sattouf.
      Je ne sais qu'en penser... je ne sais pas qui a eu cette distinction auparavant. S'ils sont nommés, j'imagine qu'un paquet d'auteurs l'ont été avant eux (?) Bilal a le grade au dessus tiens !
      Si la BD doit avancer, doit être reconnue institutionnellement comme Art, si les auteurs veulent profiter de subventions, d'aides de l'état, du CNL... me semble bien qu'ils doivent accepter la médaille (?)

      Mais en vrai, l'art se passe de l'état (heureusement)

      Dans la liste des commandeurs (le top, au dessus d'officier et de chevalier), je n'ai trouvé que Martin, Van Hamme et Schulz... au milieu de bêtes chanteurs, d'acteurs idiots... comme quoi la BD est assez mal reconnue par les institutions culturelles.
      Glénat est dans la fournée et prend du grade en devenant officier, pas encore commandeur.

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