dimanche 2 février 2014

Rencontre dessinée avec Hermann

Samedi à 11h15, au théatre d'Angoulême.
Les rencontres dessinées ne sont plus ce qu'elles étaient...

Hermann n'a pas dessiné, n'avait pas envie de parler... mais il a parlé de sa vision de son travail, du dessin... et a une question sur l'importance de Jijé pour lui, a répondu...

J'étais dessinateur en décoration intérieure et j'étais tombé chez mon beau-frère* sur des Spirou. Et j'ai vu Jijé. Je ne connaissais pas Jerry Spring et j'ai trouvé qu'au niveau graphisme, c'était le type le plus moderne, le plus fort, le type le plus chargé d'émotion graphique. Donc je suis tombé amoureux du dessin de Jijé. De telle sorte que lorsque je me suis mis à dessiner, c'était lui mon phare.
Alors l'ennui pour lui, c'est qu'est apparu Jean Giraud. Ça a été le choc, parce que Jean Giraud est un génie du dessin, qui a le sens du cinéma que n'avait pas Jijé. De toutes façons, Jijé n'aimait que modérément la bande dessinée, il préférait la peinture. Déjà ça, pour un dessinateur de bande dessinée, c'est un peu une faiblesse. Je sentais très bien que parfois ses constructions de cases étaient plutôt un truc qu'il faisait sans prendre la peine de vraiment bien équilibrer. Il y avait des dessins qu'il réussissait admirablement, mais d'autres étaient expédiés... tandis que Giraud, jamais.
J'étais à deux doigts d'abandonner la bande dessinée devant le choc que provoquait Giraud pendant un moment. Je faisais parti du studio de Greg, et lorsqu'il rentrait de rédaction, il me jetait le Pilote sur la table et me disait "jetez donc un coup d’œil aux planches de Giraud". Je regardais ça d'abord en soulevant le coin de la page... "Oh merde !!" Je tombait de cheval. Il ne m'a jamais découragé, mais il m'envoyait un coup de poing dans l'estomac, le salaud. Je n'étais pas jaloux, mais vraiment, il me tétanisait. On finit par être habitué de ce choc, et on continu. Je ne suis jamais parvenu a égaler Giraud, mais enfin, ce n'était pas une raison pour ne pas continuer à  dessiner à ma manière. Il ne faut jamais abandonner, vous n'avez pas le choix... ou alors vous vous installer dans un coin et vous pleurez... c'est pas la solution.

Je ne lis plus Hermann, mais il faudrait être aveugle pour ne pas admettre que c'est un dessinateur exceptionnel, une bête de travail, moins misanthrope qu'il n'y parait, moins bougon qu'on ne le lit.

*Philippe Vandooren, rédacteur en chef de Spirou de 82 à 87, scénariste de Hé, Nic ! tu rêves ?

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